Note sommaire des Éditions G. Lebovici
sur les difficultés de la traduction du « Panégyrique » de Guy Debord[Guy Debord], novembre 1989 1re édition : Guy Debord, Panégyrique. Tome second
Librairie Arthème Fayard, Paris, septembre 19972e édition : Jean-François Martos, Correspondance avec Guy Debord
Le fin mot de l’Histoire, Paris, août 1998I LA TRADUCTION¹ de ce Panégyrique présente de nombreuses difficultés si elle est confiée à quelqu’un de très compétent ; et sinon elle est impossible. Elle ne devra donc pas même être entreprise dans les conditions de déficience qui ont malheureusement dominé, depuis plusieurs années, la pratique de la traduction dans l’édition européenne. Qui se refuse à comprendre que ce livre comporte beaucoup de pièges et de sens multiples délibérément voulus ; ou qui ne serait pas parvenu à trouver quelqu’un de suffisamment qualifié pour être capable de ne pas s’y perdre, doit abandonner tout de suite l’ambition de le publier dans une langue étrangère ; et donc laisser cette liberté à d’autres éditeurs ultérieurement plus capables.
Il faut d’abord prendre conscience que, derrière le français classique — qu’il faut tout d’abord sentir et dont on doit savoir donner un équivalent étranger — se dissimule un emploi spécialement moderne de ce « langage classique » ; nouveauté qui est donc insolite et choquante. Une traduction doit rendre le tout, fidèlement.
La plus grande difficulté consiste en ceci : ce livre contient, certes, bon nombre d’informations qu’il faut exactement traduire. Mais il n’est pas essentiellement affaire d’information. Pour l’essentiel, son information réside dans la manière même dont elle est dite.
Chaque fois, et c’est très fréquent, qu’un mot, ou qu’une phrase, a deux sens possibles, il faudra reconnaître et maintenir les deux ; car la phrase doit être comprise comme entièrement véridique aux deux sens. Cela signifie également, pour l’ensemble du discours : la totalité des sens possibles est sa seule vérité.
Pour donner un exemple très général de cet effet, toutes les épigraphes des chapitres doivent d’abord être évidemment comprises comme ironiquement dirigées contre l’auteur. Mais il faudra aussi sentir que ce n’est pas une ironie simple : doivent-elles être en fin de compte ressenties comme véritablement ironiques ? Il faudra laisser intact ce doute.
Différents vocabulaires (militaire, juridique) sont employés normalement selon certains sujets évoqués, de même que s’y mélangent les tons des citations de très diverses époques. Le traducteur ne doit pas être incapable, ni s’étonner, de reconnaître dans le langage de l’auteur, en quelques rares occasions, un mot familier, ou même argotique. Il a été délibérément employé, comme le sel, justement pour faire ressortir la saveur des autres. De même l’ironie, parfois, est intimement mélangée avec le ton lyrique, sans lui enlever son sérieux positif.
Il n’est en tout cas pas possible de conclure actuellement sur ce que pourra être le sens total et définitif de cet ouvrage : ceci reste justement en suspens, puisqu’il ne s’agit que du tome premier. La fin de ce livre se trouve projetée hors de lui.
Ce glissement continuel du sens, qui est plus ou moins manifeste dans chacune de ses phrases est également présent dans le mouvement général du livre entier. C’est ainsi que la question du langage est traitée à travers la stratégie (chapitre I) ; les passions de l’amour à travers la criminalité (chapitre II) ; le passage du temps à travers l’alcoolisme (chapitre III) ; l’attirance des lieux à travers leur destruction (chapitre IV) ; l’attachement à la subversion à travers le contre-coup policier qu’elle entraîne continuellement (chapitre V) ; le vieillissement à travers le monde de la guerre (chapitre VI) ; la décadence à travers le développement économique (chapitre VII).
On peut citer particulièrement en exemple une phrase de la page 41 : « Entre la rue du Four et la rue de Buci, où notre jeunesse s’est si complètement perdue, en buvant quelques verres, on pouvait sentir avec certitude que nous ne ferions jamais rien de mieux. » Que signifie exactement cette phrase ? Elle signifie tout ce qu’il est possible d’y mettre. Au mépris de la bonne règle classique, cette apposition : « en buvant quelques verres », doit pouvoir être rattachée, et là comme un euphémisme, à la phrase précédente ; mais elle doit aussi être rattachée à la phrase qui la suit, et alors elle fait figure d’observation exacte et instantanée. Mais en outre le sujet représenté par le « on » peut être également compris comme étant un observateur extérieur (et dans ce cas pleinement désapprobateur), et comme étant le jugement subjectif de cette jeunesse (et dans ce cas exprimant une satisfaction philosophiquement ou cyniquement lucide). Tout est vrai, il ne faut rien en retrancher.
II Considérant la complexité de ce livre, un éditeur ne devra confier cette tâche qu’à un traducteur qui soit familier du français classique (c’est-à-dire des livres parus avant 1940) et, d’autre part, qui soit considéré comme un bon prosateur dans sa propre langue. Et faute de le découvrir, il lui faudrait laisser à un autre éditeur l’occasion de tenter plus tard d’y parvenir dans des conditions convenables. Le traducteur retenu sur de tels critères devra aussitôt faire l’épreuve, pour la soumettre à l’auteur, d’un essai de traduction des passages suivants.
Pages 13-14. Depuis « Ma méthode… » jusqu’à : « l’ancienne société. »
Pages 50-51. Depuis « La majorité des vins… » jusqu’à : « avant le buveur. »
Pages 75-76. Depuis « Je me suis beaucoup intéressé… » jusqu’à : « je laisserai d’autres conclure. »
Pages 88-89. Depuis « Les plaisirs de l’existence… » jusqu’à : « le soupçonner d’être passéiste. »
Il faudra en outre avoir traduit la phrase déjà évoquée de la page 41 : « Entre la rue du Four et la rue de Buci… »
Ceux qui auront satisfait à ces exigences pourront, bien sûr, ultérieurement, demander à l’auteur tous éclaircissements qui leur paraîtraient souhaitables pour comprendre quelques autres points.
III Le passage écrit dans le jargon des Coquillards (pages 38-39) signifie ceci :
« J’y ai connu quelques têtes que guettait le bourreau : des voleurs et des meurtriers. On pouvait se fier à eux comme complices, car ils n’hésitaient jamais devant le recours à la force. Ils étaient souvent arrêtés par les policiers ; mais habiles alors à se prétendre innocents, jusqu’à les égarer. C’est là que j’ai appris comment il faut décevoir ceux qui vous interrogent, de sorte que longtemps après et ici, sur ces affaires, je préfère continuer à garder le silence. Nos violences et nos joies sur la terre se sont éloignées. Pourtant, mes camarades sans argent qui comprenaient si bien ce monde trompeur, je me souviens vivement d’eux : quand nous nous retrouvions tous à nos mêmes rendez-vous, la nuit à Paris. »
Dans une traduction espagnole ce passage devrait être rendu en germanía (ou peut-être en caló). Dans une traduction anglaise, il faut employer le cant. Une traduction allemande devra utiliser le Rotwelsch. L’italienne devra recourir au furbesco. Le traducteur pourra ici se faire aider par un spécialiste.
IV Quant aux citations dont le nom de l’auteur n’a pas été donné, on rencontre, dans l’ordre :
Page 16, le cardinal de Retz. Page 35, la reine Anne d’Autriche. Page 36, la phrase « L’esprit tournoie… pour couler encore » est une paraphrase de l’Ecclésiaste. Page 39, une chanson populaire du XVIIe siècle ; un proverbe d’Auvergne. Page 51, une évocation rapide du poète Nicolas Gilbert. Page 53, Machiavel dans une lettre à Vettori, du 10 décembre 1513. Page 59, Dante en italien et une citation biblique (Psaume XXXVIII, 12-13). Page 60, une chanson des Asturies. Page 64, une image fréquente dans la poésie chinoise. Page 73, les deux citations sont de Pascal. Page 77, les citations sont d’abord de Vauvenargues, ensuite d’un chroniqueur du XVe siècle. Page 78, la première citation est de Charles d’Orléans, la seconde est du roi d’Angleterre, Guillaume d’Orange. Page 88, est renversée une autre citation biblique (« La sagesse a bâti sa maison… », Proverbes, IX). La citation des pages 89-90 est de Guy Debord (thèse 46 de La Société du spectacle). La dernière phrase du livre est la traditionnelle formule de conclusion des auteurs espagnols du Siècle d’Or.
On suppose que les citations attribuées ne présenteront pas de difficultés particulières, et pourront être localisées sans peine. Il sera en effet impératif d’employer leur texte original chaque fois qu’elles proviendraient de cette langue même où l’on doit traduire le livre. Sinon, il faudrait au moins utiliser la traduction de ces citations qui pourrait déjà exister dans le pays, si elle y fait justement autorité (c’est par exemple le cas des anciennes adaptations de la Bible, en allemand ou en anglais). Cependant, au cas où d’autres traductions, existant depuis moins longtemps, apparaîtraient mauvaises ou seulement médiocres, il faudrait évidemment les améliorer ou les refaire.
Novembre 1989
« Comme tu es, par excellence, mon historien (car je me méfie beaucoup des autres, on le sait bien), je te communique un texte semi-confidentiel, destiné d’abord aux traducteurs trop confiants dans leur compétence, mais qui peut aider la lecture. » — GUY DEBORD, lettre à Jean-François Martos, 26 décembre 1990.
* * * Panégyrique
Tome second
Guy Debord [achevé en décembre 1990]Librairie Arthème Fayard, Paris, septembre 1997 * * * « J’ai suivi un plan original, ayant imaginé une méthode nouvelle d’écrire l’histoire et choisi une voie qui surprendra le lecteur, une marche et un système tout à fait à moi. »
IBN KHALDOUN, Prolégomènes à l’histoire universelle.
* * * AVIS EN TOUTES les vérités qui composent ce Panégyrique, on reconnaîtra que la plus profonde réside dans la façon même de les faire apparaître ensemble. Il ne reste donc plus guère qu’à illustrer et commenter l’essentiel qui, dès le premier tome, a été si exactement résumé.
Le tome second contient une série de preuves iconographiques. Les tromperies dominantes de l’époque sont en passe de faire oublier que la vérité peut se voir aussi dans les images. L’image qui n’a pas été intentionnellement séparée de sa signification ajoute beaucoup de précision et de certitude au savoir. Personne n’en a douté avant les très récentes années. Je me propose de le rappeler maintenant. L’illustration authentique éclaire le discours vrai, comme une proposition subordonnée qui n’est ni incompatible ni pléonastique.
On saura donc enfin quelle était mon apparence à différents âges ; et quel genre de visages m’a toujours entouré ; et quels lieux j’ai habités. Ces circonstances rassemblées et considérées pourront parfaire le jugement. Et par exemple ma contribution à l’art extrême du siècle, comme un monument historique bien particulier, s’y trouvera exposée tout entière : c’est son excellence, d’avoir pu s’en tenir là.
À cette cohérente documentation s’ajouteront diverses données, graphologiques par exemple, que l’on devrait tenir pour superflues. Mais, ainsi, ceux qui veulent croire à l’existence de diverses méthodes de connaissance plus simples et plus directes que la science de l’histoire, ou qui du moins font confiance à l’une ou à l’autre comme technique de vérification, auront le déplaisir d’être sûrs qu’ils ne découvrent rien à m’objecter.
Les dates les plus notables de mes ouvrages, dont on pourra justement mesurer l’unité, sont mentionnées à la fin du présent tome. Dans le tome troisième², plusieurs détails encore obscurs seront expliqués.
* * * 1 « Nos seules manifestations… voulaient être complètement inacceptables ; d’abord surtout par leur forme et plus tard, s’approfondissant, surtout par leur contenu. »
1951
* LA VILLE DE PARIS « En effet, l’idée que nous nous faisons des civilisations anciennes est devenue plus sereine depuis que… nous nous sommes mis à regarder, aussi bien qu’à lire. Les arts plastiques ne se lamentent pas. »
HUIZINGA, Le Déclin du Moyen Âge.
* SÉQUENCE NOIRE DE VINGT-QUATRE MINUTES
DANS LE FILM « HURLEMENTS EN FAVEUR DE SADE » (1952)« Avant de parler, il a tiré quelques coups de pistolet puis a débité, tantôt riant, tantôt sérieux, les plus énormes insanités contre l’art et la vie. »
Paris-Midi, du 6 juillet 1914 ; recueilli dans les Œuvres d’Arthur Cravan.
* INSCRIPTION SUR LE MUR DE LA RUE DE SEINE (1953) « La prévention en fut telle d’abord dans le monde, que plusieurs de mes amis eurent le front de me demander si je plaisantais : à quoi je répondis froidement que l’événement le montrerait. »
SWIFT, Prédictions pour l’année 1708.
* « MÉMOIRES » DE 1959 (DÉTAIL) DERNIÈRE PAGE DES « MÉMOIRES » (DÉTAIL) * * * 2 « Toutes les révolutions entrent dans l’histoire, et l’histoire n’en regorge point ; les fleuves des révolutions retournent d’où ils étaient sortis, pour couler encore. »
1953
* LES QUAIS DE LA SEINE [ÉLIANE PAPAÏ] « Un particulier que ceux qui écrivent l’histoire ne sauront point, ou ne trouveront point mériter d’y être mis. Cependant c’est ce particulier qui fait connaître si nous sommes dignes d’estime ou de blâme. »
FRANÇOIS DE MOTTEVILLE, Mémoires.
* [CHEZ MOINEAU, 22 RUE DU FOUR.
FRED, MEL, UNE AMIE DE VALI,
JEAN-MICHEL MENSION, SERGE BERNA, VALI, MICHÈLE BERNSTEIN,
JOËL BERLÉ, PAULETTE VIELHOMME, UNE INCONNUE]« Nous sommes trop inattentifs, ou trop occupés de nous-mêmes, pour nous approfondir les uns les autres : quiconque a vu des masques, dans un bal, danser amicalement ensemble, et se tenir par la main sans se connaître, pour se quitter le moment d’après, et ne plus se voir ni se regretter, peut se faire une idée du monde. »
VAUVENARGUES, Réflexions et Maximes.
* IVAN CHTCHEGLOV « Nous ne sommes qu’au commencement de l’art d’écrire… Chaque vie a un thème, un titre, un éditeur, une préface, une introduction, un texte, des notes, etc. — ou peut les avoir. »
NOVALIS, Fragments.
[« THE NAKED CITY » (DÉTAIL)] * [(CLAUDE STRELKOFF), KAKI, ÉLIANE DERUMEZ, JOËL BERLÉ,
(PIERRE FEUILLETTE, GARANS) CHEZ MOINEAU][GHISLAIN DE MARBAIX] « Si vous allez à Montpipeau — ou à Ruel, gardez la peau :
— Car, pour s’ébattre en ces deux lieux… — la perdit Colin de Cayeux. »VILLON, Belle leçon aux enfants perdus.
* LE 1 DE L’IMPASSE DE CLAIRVAUX [LA SEINE ET LA POINTE OCCIDENTALE DE L’ÎLE DE LA CITÉ] « Tout cela est à jamais fini, tout s’écoule à la fois, les événements et les hommes — comme ces flots incessants du Yang-tseu-kiang, qui vont se perdre dans la mer. »
LI PO, À Nan-king.
* * * 3 « Un concours de circonstances a marqué presque tout ce que j’ai fait d’une certaine allure de conspiration. »
1958
* COSIO D’ARROSCIA (ALPES DE LIGURIE) AVEC MICHÈLE BERNSTEIN ET ASGER JORN
À PARIS PEU APRÈS LA FONDATION DE L’I.S.« Et buvons encore tous ensemble à notre propre gloire, pour que nos petits-fils et leurs fils se redisent : il y eut jadis des hommes qui ne rougirent point de leurs camarades et qui n’abandonnèrent point leurs amis. »
GOGOL, Tarass Boulba.
* ASGER JORN * LE 32 DE LA RUE DE LA MONTAGNE-SAINTE-GENEVIÈVE [GUY DEBORD] « Par laquelle œuvre se pourra connaître la grandeur du prince dont vous parlerai, et aussi de votre entendement. »
COMMYNES, Mémoires.
* « DIRECTIVE N° 2 » (1963) « Timon le caractérise ainsi : “Voici surgir Héraclite le braillard, l’insulteur de la foule, qui parla par énigmes.” D’après Théophraste, son humeur mélancolique lui fit écrire des œuvres restées inachevées et d’autres où les idées sont exprimées contradictoirement… Son livre acquit tant de renom qu’on vit apparaître des disciples qu’on appela Héraclitéens. »
DIOGÈNE LAËRCE, Vies et doctrines des Philosophes célèbres.
AUTRES PRÉVISIONS ILLUSTRÉES * « J’avais présumé que le plus sûr moyen d’arriver à des découvertes utiles, c’était de s’éloigner en tout sens des routes suivies par les sciences incertaines, qui n’avaient jamais fait la moindre invention utile au corps social, et qui, malgré les immenses progrès de l’industrie, n’avaient pas même réussi à prévenir l’indigence. Je pris donc à tâche de me tenir constamment en opposition avec ces sciences ; en considérant la multitude de leurs écrivains, je présumai que tout sujet qu’ils avaient traité devait être complètement épuisé, et je résolus de ne m’attacher qu’à des problèmes qui n’eussent été abordés par aucun d’entre eux. »
FOURIER, Théorie des Quatre Mouvements.
MANUSCRIT DE « LA SOCIÉTÉ DU SPECTACLE » (1967) * « Si vous êtes dans un lieu de mort, cherchez l’occasion de combattre. J’appelle lieu de mort ces sortes d’endroits où l’on n’a aucune ressource, où l’on dépérit insensiblement par l’intempérie de l’air, où les provisions se consument peu à peu sans espérance d’en pouvoir faire de nouvelles ; où les maladies, commençant à se mettre dans l’armée, semblent devoir y faire bientôt grands ravages. Si vous vous trouvez dans de telles circonstances, hâtez-vous de livrer quelque combat. »
SUN TSÉ, L’Art de la guerre.
[« À BAS LA SOCIÉTÉ SPECTACULAIRE-MARCHANDE »] * POSTÉRITÉ DES « DIRECTIVES » DANS L’ÉPIGRAPHIE DE 1968 * ALICE BECKER-HO « L’hiver s’acheva alors et, avec lui, la dix-huitième année de la guerre dont Thucydide a écrit l’histoire. »
THUCYDIDE, Guerre du Péloponnèse.
* * * 4 « J’ai donc assez bien connu le monde ; son histoire et sa géographie, ses décors et ceux qui les peuplaient. »
1968
* L’ITALIE ET L’ESPAGNE HABITÉES * L’OLTRARNO EN 1972 « Les Français sont par nature friands du bien d’autrui, et à la fois fort prodigues tant du leur que de celui des autres. »
MACHIAVEL, Rapport sur les choses de la France.
* LE 28 DE LA VIA DELLE CALDAIE * PIEVE DANS LES MONTS DU CHIANTI CHAMPOT « Nous ne pouvons pas plus affranchir nos écrits de toute contrainte que nous ne pouvons être nous-mêmes affranchis de tout. Mais nous pouvons les faire aussi libres que nous le sommes. »
MAX STIRNER, L’Unique et sa propriété.
* [TOÑI LOPEZ PINTOR] « Si je vous l’avais montrée, répliqua don Quichotte, que feriez-vous en confessant une vérité si notoire et si évidente ? L’important est que sans la voir vous le devez croire, confesser, affirmer, jurer et défendre, et, au cas que vous ne le faites… je vous attends ici de pied ferme, me confiant en la raison que j’ai de mon côté. »
CERVANTÈS, Don Quichotte.
* * * 5 « Je me suis beaucoup intéressé à la guerre… à faire apparaître l’essentiel de ses mouvements sur un échiquier assez simple : les forces qui s’affrontent, et les nécessités contradictoires qui s’imposent aux opérations de chacun des deux partis. »
1977
* « Je dirai surtout que, pour être fort sur les points que l’on attaque, il est presque indispensable d’être faible sur ceux que l’on défend, et que lorsqu’un détachement est battu les conséquences en sont bien moins funestes quand il est peu nombreux que quand il est fort ; que d’ailleurs plus il est faible, moins il est exposé à une défaite, parce que son chef redouble de prudence et de précautions pour éviter les affaires où il pourrait craindre de se voir trop séreusement engagé. »
GOUVION SAINT-CYR, Mémoires.
SCHÉMA DE LA TRENTIÈME PHASE D’UN CONFLIT SUR LE KRIEGSPIEL * « L’on craint beaucoup plus d’un ennemi qu’il ne peut exécuter ; et, quoique l’on ait une grande expérience, on ne laisse pas d’appréhender des choses que l’on sait bien que l’on ne ferait pas, si on était à sa place ; mais, comme il arriverait de grands maux si un ennemi faisait plus qu’on ne pense, on aime mieux remédier à ce que même on croit qu’il ne peut pas faire. »
TURENNE, Mémoires.
LA BRIGADE LÉGÈRE DANS LE FILM
« IN GIRUM IMUS NOCTE ET CONSUMIMUR IGNI »* DÉTAIL DU KRIEGSPIEL « Si les progrès dernièrement faits par l’art de la guerre ont suffisamment démontré qu’on ne défend point un pays de montagnes avec des systèmes de cordons et de grandes lignes retranchées ; il est également vrai de dire qu’on n’obtiendrait pas de bien meilleurs résultats en occupant de fortes positions transversales et longitudinales dans le fond des vallées, sans être maître des hauteurs qui les dominent. »
LIEUTENANT-COLONEL RACCHIA, Précis analytique de l’art de la guerre.
* * * 6 « Au milieu de l’hiver de 1988, à la nuit, dans le square des Missions Étrangères, une chouette reprenait obstinément ses appels, trompée peut-être par le désordre du climat. »
1984
* LE SQUARE DES MISSIONS ÉTRANGÈRES PREMIÈRE PAGE DES « COMMENTAIRES » DE 1988 « Mais comme je n’ai eu dessein que de faire des remarques qui sont toutes détachées l’une de l’autre, et dont l’intelligence ne dépend nullement ni de celles qui précèdent ni de celles qui suivent, la liaison n’y eût servi que d’embarras, et j’eusse bien pris de la peine pour rendre mon travail moins agréable et moins utile, car il est certain que cette continuelle diversité de matières récrée l’esprit et le rend plus capable de ce qu’on lui propose, surtout quand la brièveté y est jointe comme ici et qu’on est assuré que chaque remarque fait son effet. »
VAUGELAS, Remarques sur la langue française.
* PARIS HABITÉ MAIN DE L’AUTEUR « L’homme, à certaines heures, est maître de son destin. Nos fautes, cher Brutus, ne sont point dans nos étoiles, mais dans nos âmes prosternées. »
SHAKESPEARE, Jules César.
* SÉQUENCE DES CONCLUSIONS DANS LE FILM « LA SOCIÉTÉ DU SPECTACLE » [COUVERTURE DU TOME PREMIER DU « PANÉGYRIQUE » (1989)] « Mais je dois ici vous informer une bonne fois que tout cela sera plus exactement tracé et expliqué dans une carte maintenant chez le graveur ; laquelle, avec d’autres documents et appendices, prendra place à la fin du vingtième volume, non par pour gonfler le corps de l’ouvrage, idée pour moi très détestable, mais en guise de commentaires, scolies, illustrations et éclaircissement des passages, incidents ou insinuations qu’on estimera soit sujet à une interprétation particulière, soit de sens obscur ou douteux, et ceci après que ma Vie et Opinions aura été lue (pesez bien les mots) par le monde entier… »
STERNE, Vie et Opinions de Tristram Shandy.
* * * Aperçu chronologique 1931. Naissance à Paris, le 28 décembre, à la tombée de la nuit.
1952. Film de long-métrage sans images Hurlements en faveur de Sade.
1953. Inscription sur un mur de la rue de Seine.
1954. Premier numéro du bulletin Potlatch.
1957. L’Internationale situationniste est fondée par la Conférence de Cosio d’Arroscia.
1958. Premier numéro de la revue Internationale Situationniste.
1959. Mémoires composés uniquement de phrases détournées.
1963. Cinq « directives » tracées sur des toiles.
1967. La Société du spectacle.
1968. Un comité situationniste usurpe deux jours la Sorbonne et y dément sept siècles de sottises.
1972. Autodissolution de l’Internationale situationniste.
1973. La Société du spectacle réitérée sous la forme d’un film de long-métrage.
1978. Film de long-métrage In girum imus nocte et consumimur igni.
1984. Potlatch de destruction de tout ce cinéma.
1988. Commentaires sur la société du spectacle.
1989. Premier tome de Panégyrique.
1991. Guy Debord rompt avec les héritiers des éditions Gérard Lebovici et exige la mise au pilon de tous ses livres.
1992. Par l’entremise de Jean-Jacques Pauvert, les éditions Gallimard reprennent sept titres de l’œuvre de Guy Debord.
1993. « Cette mauvaise réputation… »
1994. Le 30 novembre, Guy Debord réalise un dernier potlatch, sa mort eut ceci d’admirable qu’elle ne peut passer pour accidentelle, en se suicidant.
1995. Le 9 janvier, « Guy Debord, son art et son temps » est diffusé sur Canal+. Par une lettre datée du 14 novembre 1994, le directeur de la chaîne avait été autorisé à programmer « une soirée Guy Debord, quand vous voudrez dans le mois de janvier 1995 ». Fidèle à sa parole, Guy Debord, lui, n’y était pas.
* * *
1. De toutes les traductions de Panégyrique parues à ce jour, et dont la liste suit, les lecteurs avertis pourront, dorénavant, juger de la pertinence.
Allemagne (Éd. Tiamat)
Grèce (Éd. Eleuteros Typos)
Italie (Éd. Castelvecchi)
Portugal (Éd. Antigona)
Royaume-Uni (Éd. Verso) [Panegyric. Volume I. Translated by James Brook (1991)]
(N.d.É.).2. Le tome troisième ainsi que les suivants restés à l’état de manuscrit furent brûlés dans la nuit du 30 novembre 1994, selon la volonté de Guy Debord (N.d.É.).
3. Cet aperçu, arrêté avant la parution de Panégyrique tome second, est complété par nous (N.d.É.).
« Je vous prie aussi de me renvoyer le manuscrit et la documentation photographique que je vous ai remis le mois dernier pour la suite de Panégyrique. » — GUY DEBORD, lettre à Gérard Voitey, 19 janvier 1991.